L’année 2023 a été riche en découvertes et d’innovations scientifiques de toutes sortes. Étant féru de sciences, j’offre humblement mes suggestions des plus grandes découvertes scientifiques et innovations de l’année 2023.
Le lecteur pourra lire les sections de texte de son choix, espérant qu’elles puissent susciter son intérêt. Il pourra certainement approfondir des connaissances complémentaires ailleurs, notamment sur d’autres sites internet plus spécialisés que le mien.
L’organisation du texte se décline en deux grandes parties : l’une concerne la recherche fondamentale dont les travaux portent notamment sur l’infiniment grand et l’infiniment petit, la formation de la vie et le génome humain, et une autre partie porte sur les innovations pratiques amenant des applications immédiates ou à très court terme.
Fait intéressant, l’analyse de toutes ces découvertes permet de dégager certains constats sur le plan économique :
- Les investissements en recherche et les découvertes tendent à s’accélérer, notamment au gré du développement des pays nouvellement industrialisés, lesquels tablent de plus en plus sur l’innovation pour assurer le développement de leurs économies (ex. la Chine qui innove de plus en plus dans des secteurs de hautes technologies);
- Les investissements en recherche fondamentale sont devenus extrêmement coûteux. Par exemple, les équipements nécessaires (télescopes, accélérateurs de particules, station spatiale internationale, Tokamak, etc.) peuvent coûter plusieurs dizaines et même des centaines de milliards $US;
- Il semble y avoir une consolidation des communautés d’intérêts et des collaborations internationales dans le but d’amortir les coûts de la recherche. Cette consolidation a donné lieu à une véritable économie parallèle au niveau international, unissant les plus grandes écoles, les plus grands chercheurs, les centres de recherche et universités à travers le monde. Mais, le contexte géopolitique actuel, notamment le refroidissement de nos relations avec certains pays ainsi que la démondialisation pourraient remettre en question ces partenariats;
- Les investissements en recherche fondamentale semblent rentables malgré leurs coûts exorbitants, ce qui se reflète vers des applications à très court terme, dont certaines font notamment l’objet de la partie 2 de ce texte. En bref, ils sont rentables parce que tout le monde peut en profiter.
Voici donc mes suggestions :
1-EN RECHERCHE FONDAMENTALE
Les profondeurs du ciel
Le télescope James Webb nous a déjà habitué en 2023 aux plus beaux confinements de l’univers. Lancé en décembre 2021, l’instrument construit au coût de 10 milliards $(US) a atteint sa destination à 1,5 million de kilomètres de la terre en juillet 2022, un véritable exploit. Depuis, et aussi tout au cours de l’année 2023, il a renvoyé sur terre des images tout à fait époustouflantes des plus belles galaxies du ciel profond, situées à des millions d’années après le big bang, ainsi que des images extraordinaires des grands nuages du cosmos et des planètes de notre système solaire.
Les avancées scientifiques de James Webb ne sont pas tant reliées à l’exploit de son déploiement au point de Lagrange L2 en 2022 [1], mais à son apport extraordinaire à l’évolution des connaissances en astrophysique en 2023.
Parmi les plus grandes découvertes de James Webb en 2023, on y retrouve une image de galaxies de 500 à 800 millions d’années après le big bang, le remise en question du modèle standard de la cosmologie, la localisation du plus vieux trou noir de l’univers. [2] Les chercheurs en savent maintenant beaucoup plus sur l’existence de la matière noire, la gravité des trous noirs et leurs ondes gravitationnelles, les univers parallèles, l’unification de la théorie des quantas (infiniment petit) et de la relativité générale (infiniment grand), l’existence de planètes habitables et leur composition chimiques.
Tous ces éléments ont fait l’objet de recherches intensives en physique théorique tout au long de l’année 2023. Grâce à James Webb et d’autres télescopes, plus de 5 500 exoplanètes auraient déjà été identifiées. [3]
Dommage qu’Hubert Reeves, auteur de Silence dans l’azur, de Poussières d’étoiles et de L’heure de s’enivrer n’ait pu continuer son œuvre en 2023.
La recherche sur le vieillissement
Depuis presque toujours, on recherche la fontaine de jouvence. Chose surprenante, on se demande bien si on pourrait y arriver dans un avenir rapproché. (voir aussi mon article sur la vie éternelle)
On sait depuis plusieurs années que les télomères, ces sortes de bâtonnets d’ADN situés à l’extrémité d’un chromosome agissent comme une horloge biologique régissant la durée de vie des cellules. À chaque réplication d’une nouvelle cellule, il y a une diminution du nombre de télomères, de sorte qu’il y aurait une perte rapide d’informations génétiques nécessaires au fonctionnement cellulaire. C’est ce qui provoquerait le vieillissement.
Des chercheurs de l’université de Cologne en Allemagne ont aussi démontré en 2023 qu’on peut retarder le vieillissement biologique en améliorant le processus de transcription du code génétique. Ce processus prévoit la fabrication d’une copie ARN (la molécule messager de l’ADN) à partir d’un morceau d’ADN. Puisque ce processus devient moins précis et sujet à des erreurs avec l’âge, il serait possible de retarder le vieillissement en améliorant sa précision. Selon plusieurs scientifiques, il s’agit d’une découverte majeure.
Finalement, l’école médicale de Harvard aurait réussi à faire rajeunir une souris de deux ans en lui injectant une molécule spécifique, la nicotinamide adénine nucléotide, une sorte de carburant produit dans les mitochondries, ces centrales énergétiques des cellules. Les muscles de la souris de deux ans auraient été ramenés ainsi à un âge biologique de 6 mois. Comme si une personne de 60 ans retrouvait d’un coup la vitalité et la musculature de ses 20 ans ! Ceci signifie qu’on pourrait même inverser le processus de vieillissement.
Note de l’auteur : J’aimerais bien trouver de la nicotinamide adénine nucléotide en pharmacie. Si vous en trouvez, s.v.p. me le faire savoir.
L’infiniment petit
Le CERN, le plus grand accélérateur de particules du monde signifie Conseil Européen pour la Recherche Nucléaire. Il consiste en un anneau de 27 kilomètres de circonférence formé d’aimants supraconducteurs et de structures accélératrices qui augmentent l’énergie des particules. Le principe de l’accélérateur est de faire collisionner des particules à une vitesse proche de la vitesse de la lumière, afin d’y détecter leur composition. Il s’agit de l’instrument scientifique privilégié pour l’étude de la structure fondamentale de la matière, c’est-à-dire l’infiniment petit.
Depuis Niels Bohr, qui publiait depuis en 1913 une représentation d’un atome avec un électron en orbite autour d’un noyau, la science de l’infiniment petit a fait des pas infiniment grands. Le modèle standard des particules développé depuis montre que le noyau des atomes est constitué d’une véritable jungle de particules: c’est-à-dire de fermions, de quarks et de leptons, de hadrons et de mésons, de pions et de kaons. [4] Une chatte n’y retrouvait même plus ses petits.
Le CERN s’est rendu célèbre par la confirmation en 2012 de l’existence du bozon de Higg [5] qu’on a dénommé la particule de Dieu parce que son interaction avec d’autres particules aurait eu pour effet de leur conférer une masse peu après la création de l’univers.
En 2023, le CERN a conduit plusieurs expériences qui ont mené aux découvertes suivantes, notamment:
- Des mesures plus précises de la masse du bozon de Higg et de la force forte (C’est elle qui lie les quarks entre eux pour former les protons, les neutrons et les noyaux atomiques ; elle est si intense qu’on l’appelle la force forte (ou l’interaction forte)
- La découverte d’éléments nouveaux dans le noyau atomique permettant de comprendre sa structure complexe;
- Une mesure précise de l’asymétrie entre la matière et l’antimatière (et oui, l’antimatière existe vraiment);
- Première observation de neutrinos produits dans des collisionneurs
La quête d’une source d’énergie inépuisable
Andreï Sakharov, l’un des plus grands physiciens du 20ième siècle et prix Nobel de la paix en 1975 travaillait déjà en 1950 à la production du TOKAMAK, une sorte de soleil artificiel qui permettrait de produire une quantité presqu’inépuisable d’énergie à partir de la fusion nucléaire (voir à cet égard mon article DES SOLEILS ARTIFICIELS QUI SAUVERONT LA PLANÈTE .
Après plusieurs dizaines d’années et après y avoir investi des milliards $, on aurait réussi à produire plus d’énergie que ce qu’on y injecte : dépassant ainsi ce que l’on appelle le seuil d’ignition. En 2023, il aurait même été atteint à trois reprises. [6] Ceci signifie que la fusion nucléaire contrôlée permettrait de produire une énergie propre, peu coûteuse, et presqu’inépuisable, une solution aux besoins de la transition énergétique dans un contexte de réchauffement climatique.Ces sont en partie grâce à ces progrès qu’une vingtaine de pays dont le Canada et les États-Unis ont accepté, dans une déclaration commune à la COP28, de considérer l’énergie nucléaire comme une énergie de remplacement pour réduire notre dépendance au charbon, au pétrole et au gaz
2- DES APPLICATIONS PRATIQUES
Je présente dans le texte qui suit des exemples d’applications pratiques qui auront une incidence dans le court terme. Ces exemples d’innovations auront un impact sur le développement économique et social de la société, notamment dans les domaines de la santé, des transports et de l’énergie.
Un marteau piqueur biologique
Rien à voir avec la construction ou la démolition des bâtiments. Ce marteau-piqueur est en fait une molécule appelée aminocyanine, un colorant synthétique déjà utilisé en imagerie médicale. Cette molécule s’active mécaniquement lorsqu’on lui projette de la lumière infrarouge : elle vibre et casse les membranes externes des cellules cancéreuses. [7] Autrement dit, c’est un véritable tueur lorsqu’il devient tout rouge.
Les résultats d’une étude publiée dans la revue Nature Chemetry sont impressionnants et annoncent une révolution dans le traitement du cancer. C’est que ces marteaux-piqueurs moléculaires éliminent jusqu’à 99 % des cellules cancéreuses. [8] Cette thérapie innovante offre une approche prometteuse et non invasive pour les tumeurs particulièrement difficiles d’accès.
Des batteries solides à recharge rapide, plus sécuritaires et avec plus d’autonomie
Bien que la philosophie écolo nous avait habitué à une certaine naïveté de l’esprit humain en constatant que COP après COP, (ces grands-messes climatiques), les cibles de réduction des gaz à effets de serre sont presque toujours ratées, voilà maintenant que des avancées considérables ont été réalisées en 2023 dans le domaine des batteries automobiles, notamment par le développement des batteries solides.
Pour ainsi dire, nous sommes sauvés par la cloche grâce à la science, rendant possible la carboneutralité dans un avenir plus rapproché, puisque le secteur des transports est responsable de 50 % des émissions des GES.
Les nouveaux développements des batteries solides permettent de diminuer le temps de recharge, de prolonger la durée de vie des batteries, d’augmenter leur autonomie et de leur sécurité. En fait, ils permettront d’accroître l’intérêt des acheteurs de véhicules électriques en raison justement de l’amélioration de la performance des batteries. Reste à solutionner le problème du coût d’achat des véhicules électriques, mais il s’agit là d’une autre histoire.
Pour information, mentionnons que les batteries standards à lithium-ion sont constituées d’un liquide permettant de faire voyager les ions (charges électriques) entre deux pôles, une anode et une cathode. Dans une batterie solide, les charges électriques voyagent dans un matériau solide, composé de céramique, comme des oxydes, des sulfides, des phosphates et même, du verre.
Les batteries solides offrent de nombreux avantages par rapport aux batteries liquides :
une nette amélioration de la sécurité parce que les électrolytes solides sont ininflammables lorsqu’ils sont chauffés;
une plus grande densité énergétique avec plus de capacité d’utilisation pour des batteries plus légères et une meilleure durée de vie en raison d’une autodécharge réduite;
une mécanique simplifiée ainsi qu’une meilleure gestion thermique et une sécurité renforcée.
À l’été 2023, un jeune constructeur chinois de véhicules électriques, NIO, est devenu le premier constructeur de l’histoire à incorporer une batterie à électrolyte solide dans ses véhicules. [9]
Par ailleurs, une équipe de la Harvard John A. Paulson School of Engineering and Applied Sciences (États-Unis) a publié un texte dans la revue Nature material évoquant la possibilité de fabriquer une batterie solide qui pourrait se recharger en une dizaine de minutes seulement et qui pourrait se charger environ 6 000 fois, donc de longue durée. [10]
Les ordinateurs quantiques et l’intelligence artificielle
Les ordinateurs quantiques pourraient aussi révolutionner le monde. Déjà, qu’on s’interroge sur l’emprise et la domination de l’intelligence sur notre mode de vie, nous n’aurions encore rien vu des impacts des nouvelles puissances de calcul de ces machines.
En physique quantique, une particule peut se retrouver simultanément en superposition de plusieurs états. Plutôt que d’utiliser des bits (soit 0 ou 1) pour effectuer des calculs, les qubits sont déterminés à partir des états quantiques des particules. Ils permettent ainsi de faire des représentations simultanées de plusieurs valeurs et d’accroître ainsi de façon exponentielle la puissance de calcul, voir, de résoudre en quelques minutes des opérations que des ordinateurs traditionnels prendraient des jours à effectuer.
Ces ordinateurs ne sont pas encore au point, mais on espère disposer d’ordinateurs fiables d’ici 3 à 10 ans. On estime qu’en 2022, 35,5 milliards $ ont été investis dans le monde dans les technologies quantiques, dont 1,1 milliard $ au Canada.
Bien sûr l’intelligence artificielle a aussi l’objet de nombreuses innovations. Le lecteur pourra consulter mon article traitant des répercussions de l’intelligence artificielle sur notre société (uelles sont les répercussions de ChatGPT ? Un rapport publié par la banque d’investissement Goldman Sachs indique que 300 millions d’emplois sont menacés à travers le monde et qu’une “perturbation significative se profile à l’horizon à mesure que l’intelligence artificielle devient plus tangible“. Le rapport souligne que “la manière dont le monde s’adaptera à l’IA restera cruciale pour les revenus de millions de personnes.
Par ailleurs, OpenAI, estime que quatre travailleurs sur cinq verraient au moins 10 % de leurs tâches affectées par l’AI, et près d’un travailleur sur cinq verrait au moins la moitié de son travail affectée.
Le retour des avions supersoniques commerciaux
Le concorde, cet avion supersonique qui avait explosé en 2000, pouvait voler à mach 2, soit deux fois la vitesse du son. Les vols commerciaux furent interrompus 2003 parce que sa forte consommation de carburant (11,2 tonnes de kérozène à l’heure) le rendait déficitaire, et aussi en raison du bruit : il ne pouvait voler qu’au dessus des océans. Depuis deux ou trois ans, plusieurs projets de nouveaux concordes sont sur la planche à dessin. Parmi les projets, nous retrouvons les suivants :
- L’avion Overture de Boom supersonic pourrait faire Paris-New-York en 3h30 à 1,7 fois la vitesse du son. Trois compagnies aériennes ont déjà passé des commandes pour un total de 130 avions. Le service commercial est prévu pour 2029. L’avion sera propulsé par un carburant durable beaucoup plus écologique en remplacement du kérozène; [11] L’avion a été présenté au dernier salon de Le Bourget en 2023.
- Le X-59 conçu par la Nasa et surnommé « le fils de Concorde », est encore plus avancé. Il pourrait atteindre une vitesse de Mach 1,42. Il a comme caractéristique d’être beaucoup plus silencieux en franchissant le mur du son.
- La start-up suisse Destinus, fondée en 2021, voudrait mettre en service vers 2030 un avion autonome hypersonique à hydrogène liquide, huit fois plus rapide que les avions actuels, utilisant en partie le système propulsif des missiles de croisière. L’avion volerait à mach 5 et ferait Paris-New-York en une heure. [12]
Conclusion
Pour la paix dans le monde, faisons la science et non la guerre.
Louis Bellemare
[1] Note : le point de Lagrange, est un point où un corps a atteint une vitesse orbitale autour du soleil équivalente à celle de la terre, mais qui en est plus éloigné. L’équivalence des vitesses permet de maintenir de façon constante le soleil en éclipse par rapport à la position de l’objet et de maintenir une température de l’objet constante.
[2] 8 superbes découvertes du télescope spatial James Webb réalisées en 2023
[4] Le modèle standard de la physique des particules
[5] Note : Dois-je vous indiquer et répéter que bozon n’est pas le nom de mon chien, non plus que Higg, celui de mon perroquet
[6] Fusion nucléaire, le seuil d’ignition a été atteint à trois reprises en 2023.
[7] Un marteau-piqueur moléculaire, une révolution dans le traitement des cancers (futura-sciences.com).
[8] Des « marteaux-piqueurs » moléculaires éliminent jusqu’à 99 % des cellules cancéreuses (trustmyscience.com)
[9] Qu’est-ce qu’une batterie à électrolyte solide
[10] Sciencepost, Voiture électrique, Harvard met au point une batterie potentiellement révolutionnaire
[11] L’édition du soir, Aviation Voici à quoi ressemble l’avion supersonique Overture, ce « nouveau Concorde » annoncé pour 2026
[12] NéoZone, Un Paris-New-York en 1heure, un avion hypersonique à hydrogène, Destinus volera à cinq fois la vitesse du son.
Bravo et merci pour ce résumé des grandes réalisations scientifiques en 2023.