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La carboneutralité, un objectif réaliste ?

Diminuer le nombre d’automobiles pour la carboneutralité

Des propos tenus par le ministre de l’Économie, de l’Innovation et de l’Énergie du Québec, monsieur Pierre Fitzgibbon, ont semé une certaine incrédulité auprès de la presse. Celui-ci a affirmé que, pour respecter l’engagement du Québec à atteindre la carboneutralité, il faudrait diminuer le nombre de véhicules du parc automobile du Québec de près de la moitié. Ceci a été interprété comme s’il annonçait officiellement un objectif à atteindre.

Sans vouloir s’avancer davantage, le ministre s’est permis par la suite de rectifier le tir en affirmant que les habitudes des consommateurs devront changer de façon importante, soutenant toutefois qu’aucune cible de réduction officielle n’avait été décidée par le gouvernement.

Pourtant la cible visant la carboneutralité en 2050 est très claire et a par ailleurs été prioritairement annoncée dans le Plan pour économie verte du gouvernement du Québec.[1] [2] Mais, l’impact de cette politique sur la diminution de nombre de véhicules n’a toutefois jamais été chiffré ni annoncé nul part.

Rappelons aussi qu’à l’instar de 120 autres pays, le Canada s’est aussi engagé par La Loi canadienne sur la responsabilité en matière de carboneutralité (29 juin 2021) à atteindre la carboneutralité d’ici 2050. [3]

Cet ambitieux objectif prévoit qu’une économie n’émette plus de gaz à effet de serre en 2050, ou qu’elle compense les émissions par des mesures comme la plantation d’arbres ou la captation du carbone.

Seulement 2,8 % des véhicules du parc sont électriques actuellement

Pour parvenir à cet objectif, le gouvernement canadien entend cette fois-ci mettre sur pied un Fonds d’accélération de la carboneutralité qui est pourvu d’une enveloppe de 8 milliards $. Ce Fonds prévoit aider les entreprises à diminuer leurs émissions de GES.

Pour sa part, le gouvernement du Québec mise massivement sur l’électrification des transports via la subvention d’achat de véhicules électriques pour les particuliers. Les transports sont responsables 43 % du bilan carbone québécois.

Pour y arriver, Québec compte sur son programme incitatif d’achat de véhicules électriques, mais aussi sur l’interdiction de la vente de véhicules neuf à essence à partir de 2035 et l’accélération du déploiement des bornes de recharge rapide par Hydro-Québec et des bornes de recharge standard. Pour mémoire, le parc automobile québécois est constitué actuellement de quelque 6 millions de véhicules de promenade dont environ 170 000 qui sont considérés comme électriques, soit 2,8 %.[4]

Avec ce plan, le gouvernement du Québec offre un financement pour la mise en circulation de 1,5 million de véhicules électriques circulant sur les routes du Québec en 2030, soit une augmentation de près de 800 % de ces types de véhicules à l’arrivée de 2030 par rapport à 2023. [5]

Et si Fitzgibbon avait raison ?

S’il ne voulait souligner lui-même le caractère quelque peu irréaliste de la carboneutralité pour 2050, il a toutefois réussi. On voit par les chiffres cités plus haut que ces mesures risquent d’être largement insuffisantes. En reconduisant les programmes du Plan vert vers 2050, nous pourrions tout au plus ajouter 1,5 million de véhicules électriques à ceux prévus en 2030, soit un total de 3 millions de véhicules en 2050, ou 50 % du parc de 6 millions actuellement. Comme l’a indiqué le ministre Fitzgibbon, Il faudrait diminuer le parc de véhicules de moitié pour atteindre la carboneutralité.

Notons que le ministre de l’économie n’est pas celui qui a élaboré le Plan pour l’économie verte dont la parternité revient au ministre de l’environnement monsieur, M. Benoit Charrette. Il n’est pas non plus partie prenante de la décision des 120 autres pays et du gouvernement fédéral. Chose certaine, puisque des objectifs aussi ambitieux sont prévus dans la loi, des prévisions erronées peuvent nous amener de sérieux problèmes.

Ainsi, pour diminuer le nombre d’automobiles, l’interdiction d’acheter des véhicules neufs à essence aura certainement un impact, mais des mesures assez drastiques pourraient être mises de l’avant afin de décourager l’utilisation des automobiles, comme par exemple une taxe kilométrique, une augmentation importante des frais d’immatriculation ou des augmentations des taxes sur l’essence. L’automobile deviendrait un bien de luxe pour les riches.

Par ailleurs, certains éléments pourraient militer en faveur d’une diminution du parc automobile sans interventions de l’État : le coût des véhicules neufs ou usagers de plus en plus élevé, le développement de moyens de transport alternatifs comme le transport en commun, le télétravail qui commande une moins grande nécessité de déplacement.  Par ailleurs, l’électrification permet l’utilisation de nouveaux types véhicules qui demandent moins d’espace en infrastructures, comme par exemple, les vélos électriques, les scooter électriques et d’autres types de véhicules qui facilitent les déplacements à l’intérieur des villes.

Louis Bellemare


[1] Le gouvernement du Québec lance le Plan pour une économie verte 2030

2 Le gouvernement Legault vise la neutralité pour 2050

[3] La carboneutralité d’ici 2050

[4] Fitzgibbon insiste, il faudra réduire considérablement le parc automobile québécois

[5] Québec vise 1,5 million de véhicules électriques en 2030

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3 Comments

  1. Jean-Claude Cloutier Jean-Claude Cloutier

    Bonjour Louis,
    Il sera effectivement très difficile de réduire de façon importante le parc de véhicules tant au Québec qu’ailleurs dans le monde et je serais étonné qu’on y parvienne.

    Certes, la progression des coûts des véhicules et de l’énergie devraient favoriser un changement des habitudes de déplacement. Ceux qui sont le plus à même de le faire sont les jeunes et, de fait, une partie d’entre eux se détourne de l’automobile. Cependant, pour la plupart des ménages, ces changements ne peuvent se faire que sur une très longue période pour la simple raison que depuis plus d’un demi-siècle toute la vie est organisée en fonction de l’automobile. Même pour les résidents des quartiers centraux, il est difficile de se passer de l’automobile pour accéder aux lieux de loisirs, de services, de consommation, d’étude ou de travail. L’autobus, le vélo et un éventuel tramway ne permettent pas d’atteindre toutes les destinations souhaitées, et encore moins de permettre le transport d’objets.

    Par ailleurs, j’ai l’impression que le gouvernement Legault-Fitzgibbon mise beaucoup trop sur la filière de la batterie électrique. Pour une poignée d’emplois qui seront difficiles à combler, on oblige les Québécois à un rationnement et à un enchérissement de la consommation d’électricité.

    Il faut constater que depuis l’accord de Kyoto, nous n’avons eu droit qu’à des vœux pieux et à des cibles de plus en plus éloignées dans le temps. Ni les citoyens, ni les gouvernements qui les courtisent ne sont prêts à faire les changements nécessaires. Il faut reconnaître que ces changements seraient coûteux et diminueraient de beaucoup le bien-être.

  2. Patrice Caron Patrice Caron

    La diminution du parc auto était à prévoir depuis une décennie, nous l’avons vue venir juste à la manière dont les élu es demeurent stoïque face aux critique concernant les routes, on peu penser à Valérie Plante pour qui l’automobile est un démon à abattre. J’ajouterai qu’avec les prix des véhicules électrique, peu pourront se permettre plus d’un véhicule dans leur cour, mais nous savons que cette nouvelle vision creusera l’écart entre les moins bien nantis et les mieux placés de la société, sans oublier qu’un vélo en hiver…. et qu’en sera t-il des coûts d’électricité une fois que le gouvernement nous tiendra par le fils de courant? un retour en arrière quoi. Les villes pourraient se passer de route où les transports en commun seraient parfait. Mais que fait on des populations en régions ? Lorsque nous regardons cette fameuse carboneutralité, n’est ce pas un peu hypocrite sachant que nous y arriveront ici à coups de bâton, mais qu’avec toute la consommation auquel nous continuons de contribuer entre autre en Chine et en Inde, ces pays la dépasseront largement, mais nous aurons bonne conscience, ici au Canada. Oui il est important de diminuer toute consommation mais je me demande quel sera cette société du futur que j’aurais aidé à façonner et auquel je n’appartiendrai plus.

  3. Noël Pellerin Noël Pellerin

    Dans ma conception du bien-être, il faudrait interdire la possession privée de l’automobile (essence ou électique) à l’échelle internationale. Et je ne me fie pas sur M. Charette pour atteindre la carboneutralité, lui qui a déjà affirmé que ce n’est pas le rôle du gouvernement de chercher à modifier le comportement des gens. Il est ministre de l’Environnement. Cherchez l’erreur.

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